Le Domovoï.
En Russie, chaque maison a son esprit familier. Les paysans croient qu’un être surnaturel habite toujours avec eux. Cet être s’assied invisible à leur table, respire l’air de leur chambre; il est, en un mot, une sorte de propriétaire immatériel, ayant droit, aussi bien que le matériel, à la possession commune. L’écurie est le lieu que le Domovoï choisit d’ordinaire pour résidence. Les paysans prétendent qu’une des plus grandes distractions de cet esprit infernal est de monter à cheval.
Quand il fait beau, que le ciel est pur et étoilé, disent-ils, que la lune éclaire la plaine, le Domovoï quitte l’habitation. Après avoir tressé artistement de ses doigts agiles la crinière du coursier, il monte sur son dos et le lance à travers les champs pour commencer une course désordonnée, échevelée. Si vous voyez dans la campagne un cheval sans cavalier franchir les haies et les fossés, les naseaux frissonnants et tout blanc d’écume, si brave que vous soyez, si même vous reconnaissez ce cheval comme appartenant à votre père ou à votre frère, n’essayez pas d’arrêter sa course, c’est le Domovoï qui le monte.
La course dure la nuit entière, et si le matin, le paysan qui visite son écurie voit un de ses chevaux vacillant sur ses jambes, l’oeil morne et fatigué, il sait que ce cheval a été choisi par le Domovoï pour sa promenade nocturne.
A la maison le Domovoï est d’un caractère bénévole. Il remue bien de temps en temps les meubles; il tresse bien les fils de la quenouille, mais ce ne sont qu’amusements placides. Si cependant la maîtresse de la maison a oublié de lui jeter sa pitance habituelle, si le chef de la famille, dans un moment d’humeur, l’a accablé d’injures à haute voix, ou si telle ou telle action d’un habitant a déplu à l’esprit de la maison, gare à l’imprudent ! Le Domovoï l’attend à l’heure de son sommeil. Quand l’homme est profondément endormi, par un léger chatouillement, il le force à se coucher sur le dos. Alors, le Domovoï prend toutes sortes de figures horribles; il l’effraie dans son sommeil; puis, se complaisant dans le mal et trouvant que la peur n’est pas une vengeance suffisante, il s’assied sur le dormeur, il pèse comme du plomb sur sa poitrine, il comprime son cou et l’étrangle lentement.
Le dormeur se tord sous l’étreinte du lutin qui rit de sa douleur et le pressure encore plus. S’il ne l’étouffe pas complètement, c’est que le Tout-Puissant lui a refusé ce droit.
Dieu garde de la colère du Domovoï !
En Russie, chaque maison a son esprit familier. Les paysans croient qu’un être surnaturel habite toujours avec eux. Cet être s’assied invisible à leur table, respire l’air de leur chambre; il est, en un mot, une sorte de propriétaire immatériel, ayant droit, aussi bien que le matériel, à la possession commune. L’écurie est le lieu que le Domovoï choisit d’ordinaire pour résidence. Les paysans prétendent qu’une des plus grandes distractions de cet esprit infernal est de monter à cheval.
Quand il fait beau, que le ciel est pur et étoilé, disent-ils, que la lune éclaire la plaine, le Domovoï quitte l’habitation. Après avoir tressé artistement de ses doigts agiles la crinière du coursier, il monte sur son dos et le lance à travers les champs pour commencer une course désordonnée, échevelée. Si vous voyez dans la campagne un cheval sans cavalier franchir les haies et les fossés, les naseaux frissonnants et tout blanc d’écume, si brave que vous soyez, si même vous reconnaissez ce cheval comme appartenant à votre père ou à votre frère, n’essayez pas d’arrêter sa course, c’est le Domovoï qui le monte.
La course dure la nuit entière, et si le matin, le paysan qui visite son écurie voit un de ses chevaux vacillant sur ses jambes, l’oeil morne et fatigué, il sait que ce cheval a été choisi par le Domovoï pour sa promenade nocturne.
A la maison le Domovoï est d’un caractère bénévole. Il remue bien de temps en temps les meubles; il tresse bien les fils de la quenouille, mais ce ne sont qu’amusements placides. Si cependant la maîtresse de la maison a oublié de lui jeter sa pitance habituelle, si le chef de la famille, dans un moment d’humeur, l’a accablé d’injures à haute voix, ou si telle ou telle action d’un habitant a déplu à l’esprit de la maison, gare à l’imprudent ! Le Domovoï l’attend à l’heure de son sommeil. Quand l’homme est profondément endormi, par un léger chatouillement, il le force à se coucher sur le dos. Alors, le Domovoï prend toutes sortes de figures horribles; il l’effraie dans son sommeil; puis, se complaisant dans le mal et trouvant que la peur n’est pas une vengeance suffisante, il s’assied sur le dormeur, il pèse comme du plomb sur sa poitrine, il comprime son cou et l’étrangle lentement.
Le dormeur se tord sous l’étreinte du lutin qui rit de sa douleur et le pressure encore plus. S’il ne l’étouffe pas complètement, c’est que le Tout-Puissant lui a refusé ce droit.
Dieu garde de la colère du Domovoï !